l'essentiel Jeudi matin, trois hommes de la communauté des gens du voyage étaient jugés par le tribunal correctionnel de Cahors pour un vol présumé de coffre-fort chez des particuliers le 7 avril 2021 à Saint-Médard-de-Presque.
Le 7 avril 2021, il est 11h du matin quand la sonnette du domicile d'un couple de personnes âgées retentit. La femme de 73 ans ouvre la porte et découvre deux individus avec des casques dont un avec une veste jaune fluo de chantier. Ils se présentent comme des techniciens de la Saur et la préviennent qu'une coupure d’eau va avoir lieu. Ils lui demandent alors s'ils peuvent entrer pour voir où se situe l’arrivée d’eau. Sans se méfier, la dame va descendre au sous-sol avec eux pour leur indiquer le réseau d’eau. Son conjoint resté à l'étage, tombe nez à nez dans son salon avec deux autres individus. Ils lui racontent le même baratin et l'invitent à descendre rejoindre aider sa femme au sous-sol. Cette dernière commence à trouver la situation étrange et voyant un des deux individus remontés, le suit. Tout s'accélère alors, elle voit les deux autres en train de voler leur coffre-fort. Elle les interpelle, tente de s'interposer, ils forcent le passage, la bouscule. Elle va se saisir du boîtier de l’alarme qu'elle actionne pour prévenir les gendarmes, tandis que les voleurs partent en courant.
Une course-poursuite dangereuse
Deux voisins témoignent avoir vu un véhicule Seat blanc partir en trombe. Les enquêteurs exploitent alors les caméras de surveillance sur la route. Une Seat est en effet repérée à l'aller et au retour, les plaques d'immatriculation sont scotchées en noir mais deux lettres restent visibles. Très vite, ils alertent les brigades de gendarmerie du Lot. Un chef reconnaît ce véhicule appartenant à une personne de la communauté des gens du voyage du camp de la Rosière. Les gendarmes décident de ne pas intervenir tout de suite, puisque le coffre-fort contient trois armes, l'issu d'une intervention serait trop incertaine. Ils entament une surveillance, le lendemain le véhicule Seat sort en trombe du camp, une course-poursuite digne des films d'action se révèle trop dangereuse, les autorités abandonnent pour éviter une catastrophe. La voiture disparaît et ne reviendra pas. Le 11 avril 2021, le coffre-fort est retrouvé sur un terrain agricole, vide et calciné.
Lors de la perquisition de la caravane du propriétaire du véhicule Monsieur D, absent originaire de Limoges, les enquêteurs découvre les vêtements d'un certain C. et une facture d'un certain Monsieur B, domicilié également à Limoges. Les écoutes téléphoniques se mettent en place ainsi que les relevés des bornages de leurs téléphones. Ce sont donc ces trois hommes qui étaient jugés par le tribunal correctionnel de Cahors jeudi, ils clament leur innocence. "Vos téléphones portables ont tous été atteints d’une maladie bizarre puisque le matin des faits, ils ont tous été éteints" souligne le président.
Des réponses parfois surprenantes
En évoquant la course-poursuite du 8 avril, M. D a réponse à tout : "ah non ce n’était pas moi, je ne roule pas comme ça, j’ai mes 12 points. Vous savez on vit dans un camp de gens du voyage, les clés sont dessus tout le monde s’emprunte les véhicules !" "Mais pourquoi M. C suit le même trajet juste après, ne serait-ce pas pour venir vous récupérer alors que vous avez mis la Seat à l'ombre ?"
- "Non ce n’est pas ça. J'ai honte de le dire devant mon père mais ma compagne allait voir en cachette M. C, ils se voyaient, ils ont dû faire leurs petites affaires..."
- "On a l’impression que vous nous prenez pour des benêts, on n’est pas complètement idiots" s'agace le président.
Les questions s'enchaînent sur les agendas, leurs relations, les écoutes téléphoniques ou les messages. Les prévenus, un à un, se confondent en explications plus ou moins surprenantes. "À une époque, il y avait une émission de télévision qui s’appelait réponse à tout, on a un peu l’impression d’y être avec vous mais on a du mal à y croire" se désole le premier magistrat.
Aucune preuve tangible selon la défense
La procureure pose ses questions : "M. B pourquoi dans une conversation vous dites 'je vais aller en prison, je voudrais qu’ils viennent me chercher qu’on en finisse', avec une fille, elle dit que vous êtes obligés de dormir ailleurs que chez vous à cause de ce que vous avez fait avec M. D ?". "À cette époque, j’avais deux relations ma femme et une autre, donc je voulais couvrir mes arrières et je lui ai pas mal menti à cette fille. J'avais aussi volé des jeans" se défend-il. Elle requiert pour M. D et C : 30 mois de prison dont 8 avec sursis probatoire pendant 2 ans et pour M. B : 36 mois de prison dont 6 avec sursis.
Maître Yassfy, avocat de la partie civile, raconte que sa cliente, la femme de 73 ans, "a tout perdu ce jour-là, elle est traumatisée et vit dans la peur. Elle a quitté le Lot, son conjoint est décédé, elle ne reviendra plus jamais ici" déplore-t-il. Pour les avocats de la défense de M. D et B, il n'y a aucune preuve tangible. "C'est la commedia dell’arte dans ce dossier : on tente de rentrer des ronds dans des carrés. Un seul doute sur une seule des preuves peut suffire à relaxer la personne. C’est vrai que pourtant on n’a pas envie, quand on voit le casier, quand on les entend parler, on se dit qu'ils ont le profil, mais vous jugez moralement, pas avec la certitude que c’est bien eux qui ont commis les faits."
Le délibéré est attendu le 11 janvier 2024.
Author: Garrett Smith
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